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Diminuer les émissions de carbone de l’UE en augmentant la navigation en eau douce : quelles conséquences pour la biodiversité ?

Environ 20 000 observations de communautés de poissons et de macro-invertébrés d’eau douce sur 32 ans ont été combinées avec des données sur le trafic intérieur en eau douce et les infrastructures de navigation (ports, écluses, canaux) pour mieux comprendre l’impact de la navigation sur la biodiversité. Ce colossale travail de synthèse a été mené grâce au projet de recherche Navidiv, financé par la FRB à travers son Centre de synthèse et d’analyse de données sur la biodiversité (Cesab). Les résultats attestent de l’impact du trafic fluvial sur la biodiversité. Deux conséquences en particulier ressortent, à savoir : 

  • une diminution significative de la biodiversité, notamment par homogénéisation des communautés et plus précisément par perte de richesse taxonomique et de diversité des traits fonctionnels des poissons et des macro invertébrés,  
  • et une augmentation de la présence d’espèces exotiques envahissantes.  

 

Ces conséquences affectent particulièrement les populations d’espèces rares et celles vivant et se reproduisant dans le lit des rivières. Il ressort également de cette étude que le trafic s’avère être un indicateur pour la biodiversité beaucoup plus important que les infrastructures de navigation, en faisant ainsi l’aspect le plus important du secteur de la navigation à prendre en compte en ce qui concerne les coûts liés à la biodiversité. 

 

Outre ces relations entre navigation et biodiversité, les chercheurs et chercheuses se sont demandé si la pression exercée par le transport fluvial sur la biodiversité était amplifiée dans les paysages modifiés par les humains. Dans les paysages largement anthropisés (milieux urbains, terres agricoles par exemple), l’impact négatif du transport fluvial est fortement amplifié pour les communautés de poissons. La diminution de la diversité taxonomique et des traits est plus prononcée dans les zones où la couverture urbaine et agricole est plus importante. D’autre part, les effets négatifs liés aux canaux et cours d’eau redressés sont plus marqués dans les zones où la forêt riveraine a disparu.  

  

Ces résultats mettent en évidence le coût potentiel pour la biodiversité qu’il est nécessaire de prendre en compte face à une augmentation européenne de la navigation en eau douce dans les années à venir. Ces effets négatifs sur la biodiversité sont probablement plus importants qu’ils ne pourraient l’être si la biodiversité avait été prise en compte dans la conception du développement de ces infrastructures. Dès lors, investir davantage dans la gestion et la réhabilitation des voies navigables et dans l’atténuation des effets les plus néfastes de la navigation est indispensable. La création d’habitats à faible débit et de zones où l’impact des vagues des navires est limité pourrait atténuer les pressions sur les espèces vivant dans les lits des rivières. La réduction des polluants issus de la navigation et l’augmentation des habitats riverains le long des voies navigables pourraient également constituer des mesures d’atténuation cruciales. Un nouvel exemple de la nécessité de penser conjointement les enjeux climatiques et biodiversité.  

 

 

Tendances temporelles et spatiales des risques liés à l’imidaclopride en France

La littérature scientifique démontre que l’imidaclopride, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes, de par son usage, contamine les milieux et est responsable du déclin de la biodiversité. Ces néonicotinoïdes, famille d’insecticide la plus utilisée au monde, sont interdits en Europe depuis 2018 mais font l’objet de nombreuses dérogations ou demandes de dérogations dans de nombreux pays. Alors que les études en laboratoires montrent les effets indéniables de ces insecticides sur un grand nombre d’espèces allant des insectes aux mammifères, l’évaluation de leurs impacts sur l’environnement restent peu étudiée.

 

 

Depuis leur introduction dans les années 1990, les néonicotinoïdes sont devenus les insecticides les plus vendus au monde. Leurs utilisations, principalement sous forme d’enrobage des semences, ont été présentées comme des pratiques à faible risque pour l’environnement. Pourtant, il a depuis été démontré qu’ils contaminent les environnements terrestres et aquatiques, affectant par conséquent la biodiversité. Commercialisé en France dès 1991, l’imidaclopride est le principale néonicotinoïde utilisé en France. Il a ensuite été réglementairement interdit en 2013 dans l’Union européenne (UE) pour les cultures florales, puis en 2018 pour toutes les cultures. Toutefois, des dérogations annuelles ont été accordées pour les cultures de betteraves sucrières entre 2021 et 2022. Si l’ensemble des néonicotinoïdes, dont l’imidaclopride, a été complètement interdit pour toutes cultures dans l’UE en 2023, cette décision est néanmoins toujours contestée par plusieurs syndicats agricoles.

 

 

En effet, seuls 2 % à 20 % des néonicotinoïdes enrobant les semences sont réellement absorbés par les cultures. Le reste demeure dans le sol ou s’infiltre dans les eaux de surface. Solubles dans l’eau, les molécules sont ainsi transportées et contaminent des écosystèmes aquatiques et terrestres, même dans les zones reculées où les néonicotinoïdes n’ont pas été appliqués, comme les prairies, les haies et les champs cultivés en agriculture biologique. En raison de cette contamination généralisée et de leur efficacité à tuer les insectes non ciblés à très faibles doses, ces insecticides sont actuellement identifiés comme une cause majeure du déclin des insectes et autres invertébrés terrestres et aquatiques dans diverses parties du monde. De cette manière, l’usage de néonicotinoïdes contribue au déclin des espèces se nourrissant d’insectes, tels que les oiseaux et les poissons, en plus de leurs effets mortels sur de nombreux organismes.

 

 

Malgré la reconnaissance du risque de ces produits pour la biodiversité, leur utilisation temporelle et spatiale reste mal connue dans de nombreux pays. Ces informations sont pourtant essentielles pour évaluer les impacts potentiels de ces pesticides sur la biodiversité et pour orienter les mesures visant à établir des zones protégées ou à restaurer la biodiversité.

Dans une étude parue en juin 2024 dans la revue Science of Total Environment, un vaste ensemble de données publiques a été agrégé pour caractériser l’utilisation temporelle et spatiale en France de l’imidaclopride et des échantillonnages sur la contamination de l’eau entre 2005 et 2022 ont été analysés afin d’évaluer la pression de l’imidaclopride sur l’environnement.

 

 

Les résultats de cette étude montrent que l’usage de l’imidaclopride apparait plus important dans les régions nord et ouest en France métropolitaine, particulièrement en lien avec les cultures de céréales et de betteraves. De plus, il s’avère que la contamination des cours d’eau à l’imidaclopride est bien corrélée aux ventes, et plus élevée dans les départements traversés par la Loire, la Seine et la Vilaine, avec des concentrations suffisantes pour pouvoir impacter la biodiversité de ces territoires. Cette corrélation est plus importante pour les départements à sols alluviaux, à grès ou rocheux. La contamination est également plus marquée dans les territoires à plus fortes précipitations cumulées. Elle a été stable entre 2005 et 2011, en augmentation de 2012 à 2018, et en baisse entre 2018, année où l’usage de cette molécule a été interdit.

 

Cette étude est la première évaluation de la pression de l’imidaclopride sur la biodiversité en France et montre une corrélation spatiale et temporelle entre pratiques agricoles et niveau de contamination des eaux douces. Elle est une étape préalable nécessaire à la quantification des impacts sur la biodiversité de l’utilisation de ce néonicotinoïde. Ces travaux montrent que les niveaux de contamination présentent des risques potentiels pour la biodiversité, et que cette contamination provient bien de l’utilisation de cette molécule pour les cultures végétales. Ces résultats permettront, dans la suite du projet, d’estimer le préjudice environnemental induit par l’utilisation de cette molécule en France métropolitaine et d’identifier les zones prioritaires pour les mesures d’atténuation et de restauration.

L’émergence de la biodiversité à la télévision française de 1992 à 2009

Le mot biodiversité a été formulé pour la première fois en 1985 par le biologiste Walter G. Rosen lors du Forum national sur la biodiversité1. L’objectif de cet événement était de faire sortir le concept de diversité biologique de la communauté scientifique et de sensibiliser les économistes, les agronomes, les experts et les médias à la sauvegarde de la diversité biologique2. L’objet de cet article est de s’intéresser à son émergence à la télévision française jusqu’en 2009, soit deux ans après la tenue du Grenelle de l’environnement.