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octobre 2024  I  Article  I  CDB  I  Biodiversité et réglementation

[Biodiversité, une coordination européenne et internationale] (Re)découvrez la CDB

Cop16 de la CDB, plénière de l’Ipbes, Unoc 2025 : ces prochains mois, les rendez-vous internationaux pour la biodiversité se succèdent. Qui fait quoi ? Quelle place pour la recherche et les parties prenantes dans les processus internationaux ? Qui peut participer à quoi, à quel moment ? Quel rendez-vous à venir ? Pas toujours simple de s’y retrouver… Largement impliquée dans ces réseaux, mêlant enjeux scientifiques et sociétaux, la FRB vous propose 3 rendez-vous pour y voir plus clair. 

Premier arrêt sur image, à quelques semaines de la Cop16 : vous reprendrez bien un peu de CDB ?

Une Convention des Nations unies pour vivre en harmonie avec la nature

Instance internationale, la CDB – pour “Convention sur la diversité biologique” – émane des Nations unies. C’est en 1992 qu’elle voit le jour, à l’issue de la conférence de Rio, aussi connue sous le nom de Sommet de la Terre. Trois Conventions y sont créées : sur les changements climatiques (la CCNUCC, qui s’appuie sur le Giec), sur la lutte contre la désertification (CLD) et donc sur la diversité biologique (la CDB, qui s’appuie sur l’Ipbes). 

 

Les ambitions de la CDB sont structurées selon trois objectifs : conserver la diversité biologique ; utiliser durablement ses composantes ; partager de manière juste et équitable les avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques. Juridiquement non contraignante, la Convention doit s’appuyer sur la mise en œuvre des décisions communes par chaque pays, souverain sur son territoire.  

 

30 ans après sa création, en 2022, les 196 États Parties adoptent un cadre mondial de la biodiversité, Kunming-Montréal, pour continuer de lutter contre le déclin de la biodiversité. Prenant la suite et tirant les leçons des objectifs d’Aïchi, 23 cibles d’action à échéance 2023 y sont réparties en quatre objectifs afin de placer le monde sur la trajectoire permettant de “vivre en harmonie avec la nature” à horizon 2050. 

 

 🌐 Une instance internationale et politique.  

La CDB est la Convention qui rassemble le plus d’États. Parmi les États membres des Nations unies, seuls les États-Unis et le Vatican ne l’ont pas ratifiée. 

 

🔎 Elle s’appuie sur divers organes (de mise en œuvre, thématiques, etc.) dont un dédié aux conseils scientifique et technique, le SBSTTA (Subsidiary Body for Scientific, Technical and Technological Advice).  

En s’appuyant sur les rapports de l‘IPBES et les connaissances scientifiques, le SBSTTA produit des recommandations dans lesquels les désaccords sont explicités pour aider les décideurs à fixer les objectifs politiques à l‘échelle internationale. Ces rendus sont ensuite discutés par les représentants des États Parties au moment des Cop. Le MNHN et la FRB représentent la France au SBSTTA et en sont le relai en France en tant que co-point focal national pour le SBSTTA.  

 

👥 Tout organe ou organisme, gouvernemental ou non gouvernemental, qualifié dans les domaines se rapportant à la conservation et à l’utilisation durable de la diversité biologique peut contribuer aux Cop en qualité d’observateur.  

Sur admission par le Secrétariat de la CDB, il est ainsi possible de participer aux réunions des organes de la Convention (le SBSTTA, etc.). Leur prise de parole est toutefois limitée et leurs propositions ne peuvent être retenues que si au moins une Partie soutient ces propositions. 
 

📅 Les Cop se tiennent tous les deux ans et réunissent les chefs des États Parties. Entre chaque Cop, des réunions de préparation, notamment du SBSTTA et du SBI (l’organe dédié à la mise en œuvre), permettent d’établir des conseils scientifiques et techniques à destination des représentants politiques des pays qui négocieront ces textes lors des Cop.  

▶ En décembre 2022, la dernière Cop a permis l‘adoption du cadre mondial de la biodiversité fixant des objectifs pour “vivre en harmonie avec la nature d’ici 2050”.

▶ Prochains rendez-vous :

🔹 Du 21 octobre au 1er novembre, la Cop16 permettra la finalisation du cadre de suivi (indicateurs) du cadre mondial ainsi que des procédures de planification, le suivi, le rapportage et la revue des progrès nationaux, une analyse de la mise à jour des stratégies et plans d’action nationaux sur le cadre mondial adopté lors de la COP15.

🔹 En 2026 et 2030, les Cop17 et Cop 19 permettront un bilan intermédiaire et final des progrès sur l’avancement du cadre mondial, basé sur des rapports nationaux que doivent faire remonter les pays à la CDB.

🔹 En 2028, la Cop18 traitera notamment des actions stratégiques pour améliorer la mise en œuvre du cadre mondial et du cadre de travail concernant le Fonds pour l’environnement mondial (2030-2034).

 

Un document phare : Le cadre mondial de la biodiversité

 

4 objectifs et 23 cibles constituent le cadre mondial de la biodiversité et détaillent de manière précise et approfondie des façons de construire des trajectoires sociales et écologiques plus durables, quels que soient les contextes sociaux et écologiques des pays.

 

L’une des propositions majeures de ce texte réside dans l’appel à considérer l’intégrité des écosystèmes à la fois « naturels », peu anthropisés, et des écosystèmes modifiés, agricoles et urbains. 

 

Le Cadre définit la responsabilité actuelle et potentielle de chaque secteur, public, privé, qu’il soit agricole, industriel, financier ou de la société civile, et surtout les manières pour chacun et chacune d’être ambitieux, d’articuler ses efforts avec les autres partenaires. Il suggère une série d’outils, de politiques publiques, autant incitatives, coercitives, préventives, systémiques, etc., qu’à nouveau chaque pays peut prioriser, selon son contexte, politique, économique et social. 

 

Parmi les cibles emblématiques du cadre, la première cible vise l’intégrité de tous les écosystèmes, la deuxième concerne la restauration de 30 % des écosystèmes dégradés, la troisième – à l’insistance des pays du Nord et avec la réticence des pays du Sud – ambitionne 30 % des terres et des mers protégées d’ici 2030, les cibles 15 et 16 visent une meilleure intégration de la biodiversité respectivement par les entreprises et les citoyens. 

 

Ce texte offre un cadrage social et anthropologique ambitieux, visionnaire, résolument inclusif, préoccupé par l’accès équitable aux écosystèmes des peuples autochtones, des communautés locales, des différents genres, des générations futures, le posant comme condition nécessaire à la préservation de la biodiversité. 

 

Atteindre les ambitions posées par le cadre nécessite à présent la clarification des processus de rapportage des États (indicateurs, etc.) et l’implémentation de ces objectifs dans les stratégies nationales et sectorielles. En France, la Stratégie nationale biodiversité (SNB3) en découle directement, la mobilisation des secteurs en conditionnent son succès. 

 

+ d'infos

 

Une des missions de la FRB : faciliter votre implication dans ces réseaux ! Tout un programme dévoilé par l’équipe FRB

 

FRB - Robin Goffaux

 

Comment la CDB articule prise en compte des connaissances scientifiques, des enjeux sociétaux et gouvernance ? 

Question à Robin Goffaux, Co-point focal national du SBSTTA de la CDB 

 

Afin d’éclairer les décisions politiques à prendre lors des Cop, les États peuvent appeler à la production de plans d’action, rapports, guides ou autres formats qui rassemblent les connaissances scientifiques et techniques disponibles. Ce matériel scientifique et technique est ensuite soumis à discussion dans l’organe dédié qu’est le SBSTTA. Il produit alors, sur la base de ces documents, des recommandations pour les choix politiques à faire par les négociateurs lors de la Cop suivante. 

Les enjeux sociétaux sont quant à eux intégrés au travers de la structuration du cadre mondial actuel, faisant le lien entre la biodiversité et d’autres enjeux avec lesquels les interactions sont fortes (services écosystémiques, consommation, financements, intégration des populations et des parties prenantes, etc.) afin d’en faciliter la mise en œuvre et de lui apporter une dimension systémique. Ils sont également intégrés par les observateurs qui peuvent participer aux réunions de la CDB et les représentants des enjeux particuliers (grands groupes d’acteurs tels que les jeunes, les femmes, les communautés locales et autochtones ainsi que les ONG, les entreprises, la recherche académique, etc.). 

Étant donné que la Convention n’est pas juridiquement contraignante, la gouvernance sur l’action sera de toute façon décidée à l’échelle des États. La CDB, c’est en quelque sorte une arène de discussion où les décisions sont discutées et adoptées collectivement par l’ensemble des États participants. 

 

 

Sur ce dernier point justement, les États s’accordent-ils sur la nécessité d’action et de prise de décision pour un avenir plus durable ? Quels sujets font consensus et lesquels font débat ? 

Question à Robin Goffaux, Co-point focal national du SBSTTA de la CDB 

 

Face au constat et aux rapports sur l’état de la biodiversité dans le monde, les Parties s’accordent sur le besoin de devoir agir, d’où la Vision de la CDB à horizon 2050. Les divergences vont plutôt survenir sur la quantification de l’effort à apporter (quelle surface mondiale protéger ? quels niveaux de réduction des pressions sur la biodiversité ? etc.), sur la trajectoire et les stratégies à adopter (land sparing/land sharing, agroécologie versus intensification durable, biotechnologies etc.) ainsi que sur les moyens à mettre à disposition pour soutenir ce cadre mondial (quels besoins en financement ? quelles sources ? public, privé, pays développés, pays en développement, etc. ?, quelles responsabilités des différents pays et acteurs dans la situation actuelle ?) 

Ces divergences se matérialisent notamment au travers d’un bras de fer entre ambition et moyens, entre pays du nord et pays du sud, au travers de visions différentes (pays technologistes ou pas), de conflits entre politique des aires protégées et les peuples autochtones et communautés locales, sur les questions d’APA et de DSI. 

 

 

 

Qu’est-ce que Coop4CBD, à quel besoin répond ce réseau ?

Question à Constance Laureau, chargée de mission scientifique en affaires européennes – coordinatrice Coop4CBD 

 

Un des enjeux de la CDB réside dans le fait de trouver des compromis pour adopter une position commune à l’ensemble des États Parties. Temps politique, les Cop sont le moment où les pays viennent défendre et négocier leurs positions respectives sur les enjeux mis sur la table. Afin que les décisions y soient prises en se basant sur les meilleures connaissances disponibles, il est impératif de mobiliser l’expertise pour éclairer ces décisions.  

CO-OP4CBD est un projet européen réunissant 9 partenaires travaillant à renforcer la prise en compte de l’expertise dans les discussions de la CDB. Soutenu via le programme Horizon Europe pour 4 ans et lancé début 2023, il développe ainsi et met en œuvre une approche de mobilisation des experts afin de soutenir l’Union européenne, les États membres et pays associés,  leurs négociateurs dans les processus de la CDB. Le projet vise également à améliorer l’accès à l’expertise européenne pour les négociateurs grâce à des mécanismes renforcés de coopération technique et scientifique, et par un renforcement ciblé des capacités (processus pour faire remonter les expertises, formation à la compréhension de la CDB et ses processus, informations régulières sur les sujets en cours de discussions, etc.). En outre, CO-OP4CBD contribue au développement d’un processus de suivi et d’examen pour la mise en œuvre du cadre mondial de Kunming-Montréal sur la biodiversité. 

 

 

 

La Cop16 approche à grand pas, quel sera le rôle de l’équipe FRB sur place ?

Question à Nathalie Morata, responsable du pôle Coordination européenne et internationale  

Effectivement la FRB sera impliquée à différents niveaux lors de la Cop16. D’une part, la FRB intervient au sein de la délégation française, menée par l’ambassadrice à l’environnement Sylvie Lemmet, en tant que point focal du SBSTTA de la CDB, en soutien aux négociateurs des ministères de l’environnement et des affaires étrangères. Sous la casquette de son implication dans le projet CO-OP4CBD, l’équipe co-organise sur place des “side-events” sur des thèmes en lien avec les discussions en cours à la Cop16, avec 3 autres initiatives européennes complémentaires sur l’enjeu de mobilisation de l’expertise : le projet RESPIN, le projet BioAgora ainsi que le partenariat européen Biodiversa+. Au fil de l’eau, l’équipe pourra également suivre les discussions sur les points à l’ordre du jour de la COP 16 afin de mieux intégrer ces sujets dans les futurs travaux de CO-OP4CBD.