Biodiversité et Outre-mer
Le prix Jeunes chercheur Cos-FRB Biodiversité et Outre-mer a été remis à Pauline Palmas (IRD, UNC – Université de Nouvelle Calédonie, UPF – Université de Polynésie française) pour son travail sur « Impacts du chat haret, espèce envahissante, sur la biodiversité des îles françaises du Pacifique »
Pauline Palmas a été récompensée par le programme Science & enseignement EDF – Institut de France – Académie des sciences, la LPO et le comité français de l’UICN. Elle explique ci-dessous ses travaux et projets.
Impacts du chat haret, espèce envahissante, sur la biodiversité des îles françaises du Pacifique
Le rôle des chats errants, dits harets, dans l’érosion de la biodiversité sur les îles ne cesse de se confirmer mais certaines zones géographiques sont encore déficitaires en données. C’est le cas de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie, hotspots de biodiversité. Mon travail concerne l’évaluation de l’impact de ce prédateur, notamment par l’étude de l’écologie trophique et la quantification des proies natives consommées. En Nouvelle-Calédonie, les résultats obtenus viennent noircir le bilan mondial des impacts de cette espèce sur les faunes insulaires (lézards, roussettes, oiseaux) et permet de dégager des pistes en matière de gestion et de conservation. Le travail démarré en Polynésie française se focalise en particulier sur les oiseaux puisque ces îles abritent de nombreuses espèces endémiques et menacées.
De tels projets de recherche en biologie de la conservation permettent d’identifier les menaces qui pèsent sur la biodiversité, éléments nécessaires aux décisions des politiques et gestionnaires en charge de la sauvegarde de la biodiversité. Ma motivation et mon engagement sur ces problématiques sont très clairs, avec la perspective d’un projet d’étude plus large à l’échelle des îles de Mélanésie et de Polynésie, en collaboration avec des équipes australiennes. Ces recherches visent à disposer de connaissances robustes sur les impacts occasionnés aux faunes natives qui sont particulièrement nécessaires pour élaborer des stratégies performantes de gestion.
Depuis 2008, EDF, l’institut de France et l’Académie des sciences s’associent pour agir de manière forte dans le domaine de la science et de l’enseignement afin de contribuer à développer la connaissance et la compétence dans le secteur des énergies bas carbone. Cet engagement commun permet le soutien de nombreuses chaires d’enseignement et de recherche, de formations de niveau Master et participe au rayonnement de la science. Il favorise aussi la diversité, notamment sociale, à travers un programme de bourses qui touche, chaque année, une centaine d’étudiants en Master.
Ce partenariat valorise enfin l’excellence à travers sa contribution à différents prix récompensant des chercheurs : Prix Ampère, un des grands prix de l’Académie des Sciences ; Prix Paul Caseau, qui récompense de jeunes chercheurs ayant soutenu une thèse de doctorat dans le domaine de l’électricité, de la modélisation et de la simulation appliquées à l’énergie ou encore de l’informatique.
Compte tenu des enjeux liés à la conciliation de la production d’électricité et de la protection de la biodiversité, il était logique qu’il s’associe dès sa création au prix Jeunes chercheurs de la FRB. La limitation du développement des espèces exotiques envahissantes est notamment un des sujets sur lequel nous menons des actions et sur lequel des apports de connaissances se font sentir.
La LPO s’est engagée depuis plus d’un siècle pour la protection des oiseaux, puis elle a progressivement aggrandi son champ d’action. En 2012, pour son centenaire, la LPO a élargi son objet statutaire à l’ensemble de la biodiversité lors de son Assemblée Générale.
Aujourd’hui, la LPO a pour objet, sur le territoire national et en tous lieux, d’agir ou de contribuer à agir dans les domaines de la recherche, de la connaissance, de la protection, de la conservation, de la défense, de la valorisation et de la reconquête de la nature et de la biodiversité. L’association contribue à l’observation, à la compréhension et au suivi de l’évolution de la nature et de la biodiversité en proposant toutes actions qui lui seraient favorables. Le soutien à la recherche sur la biodiversité fait donc partie des enjeux auxquels la LPO est forcément sensible.
Si généralement ce soutien se traduit concrètement par des actions directes avec des partenaires scientifiques impliqués dans les programmes de conservation et de gestion des espaces naturels pilotés par la LPO, cet appui peut aussi prendre d’autres formes. En l’espèce, le projet de recherche sur les espèces invasives outre-mer rejoint directement les préoccupations de la LPO. En effet, la LPO vient de nouer des accords de partenariats avec cinq ONG des Outre-mer français, avec lesquels elle entreprend un second projet LIFE pour la protection de la biodiversité, largement menacée par des espèces exotiques envahissantes. Le projet de Pauline Palmas rejoint parfaitement les préoccupations de la LPO.
L’UICN fonctionne grâce à son extraordinaire réseau d’experts. Des milliers dans le monde, des centaines en France, dont la plupart sont aussi des chercheuses et des chercheurs. Sans eux, comment élaborer la liste rouge mondiale, les listes rouges nationales et régionales des espèces menacées ? Comment inventer, pour ralentir le changement climatique, pour en rendre les conséquences plus supportables, des solutions innovantes fondées sur la nature ? Comment comprendre les mécanismes de concurrence avec les espèces envahissantes, pour être capable de les contenir ? Comment concevoir et organiser une science citoyenne, nouvelle manière de rassembler des données avec la participation du plus grand nombre possible de femmes, d’hommes, d’enfants, même non spécialistes ? Comment élargir, moderniser l’aménagement, la gestion adaptative des espaces naturels protégés, pour les adapter aux enjeux de demain ?
Les membres du comité français de l’UICN, tous engagés pour essayer que le monde vivant cesse de s’appauvrir, que soit ralenti l’emballement du rythme de disparition des espèces d’animaux, de plantes, de champignons, que soit patiemment réparé, consolidé le tissu vivant de la planète, ont faim de lire, d’écouter les chercheurs, de les appeler à l’aide, parfois. De travailler avec eux, en apportant leur expérience, leurs questions, et en s’enrichissant de leurs réponses, et aussi de leurs interrogations passionnantes. Pour cela, la FRB nous est, depuis dix ans, de plus en plus irremplaçable !